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Majjhima Nikaya 21

Kakacupama Sutta

La parabole de la scie

(extrait)

D'après la traduction du Pali à l'Anglais par Thanissaro Bhikkhu.
Pour libre distribution. Cet ouvrage peut être republié, reformaté, réimprimé et redistribué par n'importe quel média. L'auteur désire cependant que toute ces republications et redistributions soient mises à disposition du public librement et sans restriction aucune, et que les traductions et autres travaux dérivés soient clairement identifiés comme tels.


...

"Jadis, moines, dans cette même Savatthi, il y avait la dame d'une maisonnée nommée Vedehika. Il y circulait ce bon rapport sur la dame Vedehika: 'Madame Vedehika est gentille. Madame Vedehika a bon caractère. Madame Vedehika est calme.' Or, madame Vedehika avait une esclave du nom de Kali qui était diligente, adroite, et soignée dans son travail. Il vint à Kali l'esclave l'idée suivante: 'Il circule ce bon rapport sur madame Vedehika: "madame Vedehika a bon caractère. Madame Vedehika est gentille. Madame Vedehika est calme." Or donc, la colère est-elle présente en madame sans que ça se voie, ou est-elle absente? Ou est-ce juste parce que je suis diligente, adroite, et soignée dans mon travail que la colère présente en madame ne se voit pas? Pourquoi ne pas la mettre à l'épreuve?'

"Donc Kali l'esclave se leva après le lever du jour. Alors madame Vedehika lui dit: 'Ho, Kali!'

"'Oui, madame?'

"'Pourquoi t'es-tu levée après le lever du jour?'

"'Pas de raison particulière, madame.'

"'Pas de raison particulière, méchante esclave, et pourtant tu te lèves après le lever du jour?' Irritée et contrariée, elle fronça les sourcils.

"Alors il vint à Kali l'esclave l'idée suivante: 'La colère est présente en madame sans que ça se voie, et non pas absente. Et ce n'est que parce que je suis diligente, adroite, et soignée dans mon travail que la colère présente en madame ne se voit pas. Pourquoi ne pas la mettre à l'épreuve un peu plus?'

"Alors Kali l'esclave se leva plus tard dans la journée. Alors madame Vedehika lui dit: 'Ho, Kali!'

"'Oui, madame?'

"'Pourquoi t'es-tu levée plus tard dans la journée?'

"'Pas de raison particulière, madame.'

"'Pas de raison particulière, méchante esclave, et pourtant tu te lèves plus tard dans la journée?' Irritée et contrariée, elle rouscailla.

"Alors il vint à Kali l'esclave l'idée suivante: 'La colère est présente en madame sans que ça se voie, et non pas absente. Et ce n'est que parce que je suis diligente, adroite, et soignée dans mon travail que la colère présente en madame ne se voit pas. Pourquoi ne pas la mettre à l'épreuve un peu plus?'

"Alors Kali l'esclave se leva encore plus tard dans la journée. Alors madame Vedehika lui dit: 'Ho, Kali!'

"'Oui, madame?'

"'Pourquoi t'es-tu levée encore plus tard dans la journée?'

"'Pas de raison particulière, madame.'

"'Pas de raison particulière, méchante esclave, et pourtant tu te lèves encore plus tard dans la journée?' Irritée et contrariée, elle se saisit d'un rouleau à pâte et lui en donna un coup sur la tête, lui ouvrant le cuir chevelu.

"Alors Kali l'esclave, avec du sang coulant à flots de son crâne ouvert, sortit et dénonça sa maîtresse aux voisins: Voyez, mesdames, le travail de la dame si gentille? Voyez le travail de la dame au si bon caractère? Voyez le travail de celle qui est si calme? Comment a-t-elle pu, irritée et contrariée envers sa seule esclave pour s'être levée après le lever du jour, se saisir d'un rouleau à pâte et lui en donner un coup sur la tête, lui ouvrant le cuir chevelu?'

"Après cela circula ce mauvais rapport sur madame Vedehika: 'Madame Vedehika est vicieuse. Madame Vedehika a mauvais caractère. Madame Vedehika est violente.'

"De la même manière, moines, un moine peut bien être tellement gentil, avoir tellement bon caractère, rester tellement calme, tant et aussi longtemps qu'il n'est pas touché par des aspects désagréables du langage. Mais c'est seulement quand des aspects désagréables du langage le touchent qu'il peut vraiment être connu comme étant gentil, calme et ayant bon caractère. Je ne puis pas dire d'un moine qu'il est facile à admonester s'il n'est facile à admonester et ne se rend facile à admonester qu'en raison des robes, de la nourriture d'aumône, du logement, et du nécessaire médicinal pour soigner les malades. Pourquoi cela? Parce que s'il n'obtient pas de robes, de la nourriture d'aumône, du logement, et du nécessaire médicinal pour soigner les malades, alors il n'est pas facile à admonester et ne se rend pas facile à admonester. Mais si un moine est facile à admonester et se rend facile à admonester purement par estime pour le Dhamma, respect pour le Dhamma, révérence pour le Dhamma, alors je le dis facile à admonester. Ainsi, moines, vous devez vous exercer: 'Nous serons faciles à admonester et nous rendrons faciles à admonester purement par estime pour le Dhamma, respect pour le Dhamma, révérence pour le Dhamma.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Moines, il y a ces cinq aspects du langage par lesquels les autres peuvent s'adresser à vous: opportun ou inopportun, vrai ou faux, affectueux ou rude, profitable ou non-profitable, dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Les autres peuvent s'adresser à vous de façon opportune ou de façon inopportune. Ils peuvent s'adresser à vous avec ce qui est vrai ou avec ce qui est faux. Ils peuvent s'adresser à vous de façon affectueuse ou de façon grossière. Ils peuvent s'adresser à vous de façon profitable ou de façon non-profitable. Ils peuvent s'adresser à vous dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Dans tous les cas, vous devez vous exercer: 'Nos esprits ne seront pas affectés et nous ne dirons pas de mauvaises paroles. Nous resterons bien disposés envers le bien-être de cette personne, dans un esprit de bonne volonté, et sans haine intérieure. Nous continuerons à le pénétrer d'une conscience imbue de bonne volonté et, en commençant par lui, nous continuerons à pénétrer l'univers entier d'une conscience imbue de bonne volonté -- abondante, expansive, incommensurable, exempte d'hostilité, exempte de mauvaise volonté.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Supposons qu'un homme arrive en portant une bêche et un panier, en disant, 'Je ferai que cette grande terre soit sans terre.' Il creuserait ici et là, éparpillerait de la terre ici et là, cracherait ici et là, pisserait ici et là, en disant, 'Sois sans terre. sois sans terre.' Là, qu'en pensez-vous -- ferait-il que cette grande terre soit sans terre?"

"Non, seigneur. Pourquoi cela? Parce que cette grande terre est profonde et énorme. On ne pourrait aisément faire qu'elle soit sans terre. L'homme n'en récolterait qu'une part de de lassitude et de déception."

"De la même manière, moines, il y a ces cinq aspects du langage par lesquels les autres peuvent s'adresser à vous: opportun ou inopportun, vrai ou faux, affectueux ou rude, profitable ou non-profitable, dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Les autres peuvent s'adresser à vous de façon opportune ou de façon inopportune. Ils peuvent s'adresser à vous avec ce qui est vrai ou avec ce qui est faux. Ils peuvent s'adresser à vous de façon affectueuse ou de façon grossière. Ils peuvent s'adresser à vous de façon profitable ou de façon non-profitable. Ils peuvent s'adresser à vous dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Dans tous les cas, vous devez vous exercer: 'Nos esprits ne seront pas affectés et nous ne dirons pas de mauvaises paroles. Nous resterons bien disposés envers le bien-être de cette personne, dans un esprit de bonne volonté, et sans haine intérieure. Nous continuerons à le pénétrer d'une conscience imbue de bonne volonté et, en commençant par lui, nous continuerons à pénétrer l'univers entier d'une conscience imbue de bonne volonté égale à la grande terre -- abondante, expansive, incommensurable, exempte d'hostilité, exempte de mauvaise volonté.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Supposons qu'un homme arrive en portant gomme laque, orpiment jaune, bleu indigo, ou rouge cramoisi, en disant, 'Je vais tracer des peintures dans l'espace, Je ferai apparaître des images.' Là, qu'en pensez-vous -- pourrait-il tracer des peintures dans l'espace et faire apparaître des images ?"

"Non, seigneur. Pourquoi cela? Parce que l'espace est sans forme et sans traits. Ce n'est pas qu'il soit facile d'y tracer des peintures et de les y faire apparaître. L'homme n'en récolterait qu'une part de de lassitude et de déception."

"De la même manière, moines, il y a ces cinq aspects du langage par lesquels les autres peuvent s'adresser à vous: opportun ou inopportun, vrai ou faux, affectueux ou rude, profitable ou non-profitable, dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Les autres peuvent s'adresser à vous de façon opportune ou de façon inopportune. Ils peuvent s'adresser à vous avec ce qui est vrai ou avec ce qui est faux. Ils peuvent s'adresser à vous de façon affectueuse ou de façon grossière. Ils peuvent s'adresser à vous de façon profitable ou de façon non-profitable. Ils peuvent s'adresser à vous dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Dans tous les cas, vous devez vous exercer: 'Nos esprits ne seront pas affectés et nous ne dirons pas de mauvaises paroles. Nous resterons bien disposés envers le bien-être de cette personne, dans un esprit de bonne volonté, et sans haine intérieure. Nous continuerons à le pénétrer d'une conscience imbue de bonne volonté et, en commençant par lui, nous continuerons à pénétrer l'univers entier d'une conscience imbue de bonne volonté égale à l'espace -- abondante, expansive, incommensurable, exempte d'hostilité, exempte de mauvaise volonté.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Supposons qu'un homme arrive en portant une torche d'herbes enflammées et dise, 'Avec cette torche d'herbes enflammées je vais chauffer le fleuve Gange et le faire bouillir.' Là, qu'en pensez-vous -- pourrait-il, avec cette torche d'herbes enflammées, chauffer le fleuve Gange et le faire bouillir?"

"Non, seigneur. Pourquoi cela? Parce que le fleuve Gange est profond et énorme. Ce n'est pas qu'il soit facile à chauffer et à faire bouillir avec une torche d'herbes enflammées. L'homme n'en récolterait qu'une part de de lassitude et de déception."

"De la même manière, moines, il y a ces cinq aspects du langage par lesquels les autres peuvent s'adresser à vous: opportun ou inopportun, vrai ou faux, affectueux ou rude, profitable ou non-profitable, dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Les autres peuvent s'adresser à vous de façon opportune ou de façon inopportune. Ils peuvent s'adresser à vous avec ce qui est vrai ou avec ce qui est faux. Ils peuvent s'adresser à vous de façon affectueuse ou de façon grossière. Ils peuvent s'adresser à vous de façon profitable ou de façon non-profitable. Ils peuvent s'adresser à vous dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Dans tous les cas, vous devez vous exercer: 'Nos esprits ne seront pas affectés et nous ne dirons pas de mauvaises paroles. Nous resterons bien disposés envers le bien-être de cette personne, dans un esprit de bonne volonté, et sans haine intérieure. Nous continuerons à le pénétrer d'une conscience imbue de bonne volonté et, en commençant par lui, nous continuerons à pénétrer l'univers entier d'une conscience imbue de bonne volonté égale au Gange- -- abondante, expansive, incommensurable, exempte d'hostilité, exempte de mauvaise volonté.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Supposons qu'on avait un sac en peau de chat -- battu, bien-battu, battu de bout en bout, doux, soyeux, exempt de bruissement et craquement -- et qu'un homme arrive en portant un bâton ou un tesson et dise, 'Avec ce bâton ou ce tesson je vais prendre ce sac en peau de chat -- battu, bien-battu, battu de bout en bout, doux, soyeux, exempt de bruissement et craquement -- et je le ferai bruire et craquer.' Là, qu'en pensez-vous -- pourrait-il, avec ce bâton ou ce tesson, prendre ce sac en peau de chat -- battu, bien-battu, battu de bout en bout, doux, soyeux, exempt de bruissement et craquement -- et le faire bruire et craquer?"

"Non, seigneur. Pourquoi cela? Parce que le sac en peau de chat est battu, bien-battu, battu de bout en bout, doux, soyeux, exempt de bruissement et craquement. Ce n'est pas qu'il soit facile à faire bruire et craquer avec un bâton ou un tesson. L'homme n'en récolterait qu'une part de de lassitude et de déception."

"De la même manière, moines, il y a ces cinq aspects du langage par lesquels les autres peuvent s'adresser à vous: opportun ou inopportun, vrai ou faux, affectueux ou rude, profitable ou non-profitable, dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Les autres peuvent s'adresser à vous de façon opportune ou de façon inopportune. Ils peuvent s'adresser à vous avec ce qui est vrai ou avec ce qui est faux. Ils peuvent s'adresser à vous de façon affectueuse ou de façon grossière. Ils peuvent s'adresser à vous de façon profitable ou de façon non-profitable. Ils peuvent s'adresser à vous dans un esprit de bonne volonté ou de haine intérieure. Dans tous les cas, vous devez vous exercer: 'Nos esprits ne seront pas affectés et nous ne dirons pas de mauvaises paroles. Nous resterons bien disposés envers le bien-être de cette personne, dans un esprit de bonne volonté, et sans haine intérieure. Nous continuerons à le pénétrer d'une conscience imbue de bonne volonté et, en commençant par lui, nous continuerons à pénétrer l'univers entier d'une conscience imbue de bonne volonté égale à un sac en peau de chat -- abondante, expansive, incommensurable, exempte d'hostilité, exempte de mauvaise volonté.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Moines, encore si des bandits devaient vous dépecer sauvagement, membre par membre, avec une scie à deux poignées, celui parmi vous qui laisserait son coeur s'irriter encore par cela ne ferait pas ce que je lui demande. Même alors vous devez vous exercer: 'Nos esprits ne seront pas affectés et nous ne dirons pas de mauvaises paroles. Nous resterons bien disposés, dans un esprit de bonne volonté, et sans haine intérieure. Nous continuerons pénétrer ces gens d'une conscience imbue de bonne volonté et, en commençant par eux, nous continuerons à pénétrer l'univers entier d'une conscience imbue de bonne volonté -- abondante, expansive, incommensurable, exempte d'hostilité, exempte de mauvaise volonté.' C'est ainsi que vous devez vous exercer.

"Moines, si vous tenez constamment à l'esprit cette admonition sur la parabole de la scie, voyez-vous un quelconque aspect du langage, subtil ou grossier, que vous ne pourriez pas supporter?"

"Non, seigneur."

"Alors tenez constamment à l'esprit cette admonition sur la parabole de la scie. Cela vaudra pour votre bien-être et votre bonheur à long-terme."

C'est là ce que le Béni du Ciel dit. Gratifiés, les moines se réjouirent des paroles du Béni du Ciel.


Version anglaise d'origine:

http://www.accesstoinsight.org/canon/sutta/majjhima/mn021.html